Le dessin en archéologie, passeur d’histoire(s) et de savoir

Dès leur entrée au musée, les visiteurs du Malp sont invités dans la vie quotidienne d’il y a 5000 ans, grâce aux illustrations de Pierre-Yves Videlier. Outre l’exposition permanente, le dessinateur enrichit de ses planches l’exposition temporaire de cette année. Découvrons le dessin en archéologie, une discipline à la croisée des regards.

Juché sur une maison en construction, un homme en pagne, pieds nus, cheveux longs soigneusement attachés, s’apprête à saisir la perche que lui tend un compagnon. Nous sommes en plein chantier dans une petite communauté lacustre du Néolithique, comme si nous partagions cette existence.

La scène, dessinée par Pierre-Yves Videlier, frappe par ce sentiment de proximité – d’intimité quasiment – qui rend accessible l’état de l’art sur cette période préhistorique. Tel est le savoir-faire des illustrateurs en archéologie : transmettre le savoir scientifique à travers une approche sensible.

Accompagner la recherche en mouvement

Très tôt dans le développement de l’archéologie, le dessin a représenté les vestiges issus des fouilles de façon précise et normée, avec un objectif documentaire. Il permet notamment de souligner certains aspects des objets – tels les volumes, les fissures, l’état de conservation – plus clairement que la photographie.

Mais pour le public, les images ont une autre fonction. « Le dessin est un médium très important pour l’archéologie et son objectif de reconstitution du passé », souligne Lucile Denizot, directrice du Malp.

Une représentation vouée à évoluer avec l’état des connaissances. « Nos images ne sont jamais figées et accompagnent la recherche, il faut sans cesse les renouveler », explique Pierre-Yves Videlier. Ce cheminement complice, à l’écoute des chercheurs – qui valident et ajustent les dessins – fait de l’illustrateur un passeur de savoir… avec un petit plus.

Mes images représentent ce qui est avéré mais comportent une part d’imaginaire, par exemple pour les vêtements du Néolithique.

En l’absence de vestiges, le dessinateur compose à partir des éléments disponibles : « Il faut inventer à juste titre », résume joliment Pierre-Yves Videlier. « Les populations du Néolithique dans le Jura ou au lac de Paladru sont culturellement riches, comme en témoignent leurs outils sophistiqués, j’ai donc pu en déduire leurs coiffures soignées. »

Rester dans l’esquisse

Avec la reconstitution 3D, spectaculaire et hyper-réaliste, on pourrait perdre de vue cette incertitude inhérente à la lecture du passé. Attention à ne pas prendre toute image pour la vérité historique. « Les dinosaures ne ressemblaient pas à Jurassik Park, plaisante Pierre-Yves Videlier. Nous travaillons toujours sur des hypothèses, et la 3D pourrait nous le faire oublier. »

A l’inverse, le crayonné du dessin rappelle que les scènes proposées sont des esquisses du passé, que l’on peut gommer si de nouvelles interprétations se font jour. Une jolie métaphore de l’évolution des connaissances.

Pour aller plus loin, deux conférences à découvrir au Malp :

  • Conférence de Pierre-Yves Videlier : « Illustrateur en archéologie, quel drôle et passionnant métier ! »

Vendredi 28 juin 2024 à 19h.

Gratuit, réservation conseillée.

  • Conférence de Laurent Sieurac, auteur de bande dessinée (dans le cadre du festival « Ça bulle au village ») 

L’auteur et un archéologue, Alain Génot, redonnent vie à l’histoire antique d’Arles avec la série Arelate.

Jeudi 10 octobre à 19 h.

Gratuit, réservation conseillée.